LE ZOO DE VINCENNES (2)

Dans le journal Le Monde daté du 26 novembre 2010, un grand article intitulé « Le zoo de Vincennes pourrait perdre ses rochers ».

La note ci-dessous (« Le zoo de Vincennes (1) ») expliquait la genèse de cet espace zoologique. Je me souviens de l’avoir visité enfant et d’avoir été impressionné par la qualité de ce parc, la diversité de la faune et les monumentaux rochers. C’est là que j’y ai vu pour la première fois un okapi et un rhinocéros. Siam l’éléphant d’Asie avait déjà ses gigantesques défenses se croisant devant la trompe (il est maintenant – mal – naturalisé à la Grande Galerie de l’évolution), et les girafes étaient nombreuses. On pouvait déjeuner juste à côté de l’enclos du guépard.

Le Monde nous apprend que le zoo de Vincennes, qui s’étend sur 14,5 hectares, est fermé depuis 2008, les animaux ayant été soit maintenus sur place (girafes, par exemple), soit envoyés vers d’autres zoos comme Thoiry. De grands travaux sont prévus avec une réouverture envisagée en 2014. Bouygues, La Caisse des Dépôts et d’autres sociétés se sont associées dans une structure ad hoc appelée « Chrysalis », qui finance le projet de rénovation et assurera la maintenance du zoo en se rémunérant sur le prix des billets d’entrée pendant 25 ans. L’Etat, propriétaire du zoo (le terrain appartient toutefois à la Ville de Paris), financera 30 des 135 millions prévus.

Il est prévu de créer 6 biosphères : Savane-Sahel, Europe, Patagonie, Guyane, Madagascar et forêt équatoriale.

Un appel d’offre a été lancé en 2005 mais les lauréats ne l’ont pas été bien longtemps. TNPlus avait imaginé un très beau projet dont le coût a été estimé à 250 millions, donc beaucoup trop. Ce chiffrage est contesté par TNPlus, mais Bouygues a remplacé les lauréats par une nouvelle équipe constituée autour de l’architecte suisse Bernard Tschumi. Les travaux devraient démarrer en 2011.

Le projet Tschumi est à son tour contesté : il passerait par une suppression de tous les rochers, hormis le plus grand. Est-ce le bon choix ? Ne devraient-ils pas être classés monument historique ? Faut-il au contraire repartir de zéro ?

Suite de cette aventure sur ce site dans deux jours.

LE ZOO DE VINCENNES (1)

J’ai lu récemment un petit livre très intéressant sur la genèse du zoo de Vincennes. Il a été écrit en 1947 par Henry Thétard, que les amateurs de cirque connaissent bien pour sa « Merveilleuse histoire du cirque », ouvrage de référence dans ce domaine, même si Madame Violette Médrano m’a dit que certains passages étaient selon elles un peu éloignés de la vérité.

Colcombet Henri Thétard zoo de Vincennes

Le zoo de Vincennes est né avec l’Exposition Coloniale de 1931, dont le Maréchal Lyautey était Commissaire Général. Lors de son discours d’inauguration, le 7 mai, le Président Paul Reynaud expliquait : « Le but essentiel de l’Exposition est de donner aux Français conscience de leur Empire. La France sait qu’elle a un Empire outre-mer, elle n’en a pas acquis la certitude profonde et compréhensive, l’Exposition lui offre l’occasion d’en prendre conscience ; elle restera sans profit si elle ne provoque pas une transformation de l’esprit public ».

De mai à novembre 1931, le nombre de visiteurs sera très important : 33 millions soit près de 180 000 personnes par jour. C’est un événement considérable, à la mesure des moyens mis en oeuvre : constructions, aménagement du paysage, mobilisation de nombreux artistes parmi lesquels, par exemple, le sculpteur animalier Paul Jouve.

Début mai 1929, trois ans auparavant, Lyautey assiste à un gala du Cirque de Paris et, à l’issue de la représentation, rencontre Henry Thétard, qui présente ce soir-là un numéro de dressage d’une dizaine de lions prêtés par le très grand dompteur Alfred Court. Lyautey explique à Thétard qu’il a décidé de montrer un jardin zoologique lors de l’Exposition coloniale et lui demande qui pourrait réaliser ce projet. « Un seul homme, lui répond Henry Thétard : Hagenbeck ».

Colcombet Henri Thétard zoo de Vincennes

Malgré la réticence du Maréchal à coopérer avec un Allemand, Thétard raconte les innovations de Carl Hagenbeck et de son fils Lorenz en matière de capture et d’importation des animaux sauvages, et le révolutionnaire zoo de Stellingen. La grande innovation d’Hagenbeck, qui nous semble bien naturelle aujourd’hui tant elle est répandue, est de présenter les animaux dans des décors très élaborés (collines artificielles, plans d’eau, etc) et surtout en évitant au maximum les grilles. Les animaux sont donc séparés des visiteurs par des fossés, des rochers, laissant un peu l’illusion que les bêtes sont en liberté. Pour se rendre compte de l’innovation du procédé, il suffit de comparer la fosse aux ours et les grilles du Jardin des Plantes – même si d’importants efforts ont été faits, là aussi – avec les zoos modernes.

Convaincu, Lyautey entrera en pourparlers avec les Hagenbeck en vue de la création du « petit zoo » dont Henry Thétard sera nommé directeur en avril 1931. L’architecte fût Charles Letrosne (1868-1939).

Il serait trop long de raconter ici tous les épisodes de ce parc qui était à l’origine provisoire et s’est finalement maintenu bien au-delà de l’Exposition coloniale. Le projet initial devait s’étendre sur 6 hectares et présenter un panorama de l’ensemble de la faune de nos colonies, mais pour des raisons financières, la surface fut divisée par deux et l’origine de la faune limitée à l’Afrique. Les travaux furent très importants et connurent quelques déboires. On utilisa 250 tonnes de ciment, 600 mètres cubes de sable et de graviers ; on creusa 4 plans d’eau couvrant au total une surface de 2 200 mètres carrés, alimentés par 900 mètres de canalisations.

Colcombet Henri Thétard zoo de Vincennes

Mais on reste surtout frappé par le nombre considérable d’animaux qu’il était envisagé d’installer sur une surface somme toute réduite : 2 girafes, 4 éléphants (qui finalement vinrent d’Inde !), 9 zèbres, 12 autruches, 15 antilopes, 14 lions, 100 babouins, 200 oiseaux divers !

Henry Thétard raconte avec beaucoup de talent et d’humour le transfert des animaux par train à partir de la base de Stellingen, les querelles et jalousies entre fonctionnaires et avec Thétard, l’acclimatation des animaux, les batailles et les morts, les évasions, les nombreuses observations réalisées sur les pensionnaires du zoo. Il n’est pas étonnant que les bagarres aient été nombreuses avec 14 lions ou encore 100 singes, dont un trop grand nombre de mâles.

Colcombet Henri Thétard zoo de Vincennes

L’auteur termine ce livre très intéressant par un exposé de sa vision du zoo moderne et il faut reconnaître qu’il voyait juste.

Finalement, le zoo fut conservé, agrandi et transformé après la clôture de l’Exposition.

Et voici que l’on reparle, ces jours-ci, du zoo de Vincennes (suite dans quelques jours).

« Des hommes et des bêtes » – Henry Thétard – Editions de la Table Ronde – 1947 – 224 p.

LES VACHES DE YANN LE SACHER

J’ai découvert récemment par hasard, en tapant « postier breton » dans un moteur de recherche, l’artiste Yann Lesacher.
Yann Le Sacher Colcombet  Il a notamment comme atout d’être breton, de très bien saisir les animaux et en plus d’avoir beaucoup d’humour et d’imagination. Mais il n’est pas spécifiquement artiste animalier et j’ai constaté qu’il savait tout dessiner et peindre : les dunes, une rose, un croissant, une tête de poisson, une cabine de plage ou un bateau de pêche, on dirait qu’il ne connaît pas de limite !

Yann Le Sacher Colcombet

Regardez comme cette vache normande est belle : on l’imagine seule dans son champ, au bout du monde, un soir de grand vent et de pluie.

Yann Le Sacher Colcombet

Il a entrepris un tour de Bretagne (« La Bretagne par les contours ») et ses croquis sont toujours agrémentés d’un petit dessin humoristique absolument génial. Je vous conseille donc d’aller voir ses deux sites dont je mets ci-dessous quelques extraits, avec son autorisation.

Yann Le Sacher Colcombet

Le premier de ses sites est : http://www.lesacher.com/
Le second site, dédié au tour de la Bretagne est : http://yal.over-blog.com/
Yann Le Sacher Colcombet

LA MÉNAGERIE DU CIRQUE

 J’aime beaucoup le cirque, surtout, évidemment, pour ses animaux.

Cirque Colcombet

Oh ! Je sais bien que, malgré d’incontestables progrès et des réglementations plus strictes, bon nombre d’entre eux ont une toute petite cage et que les conditions sanitaires ne sont pas toujours extraordinaires. Mais c’est ainsi : depuis que suis petit, comme beaucoup, l’odeur de la paille, des éléphants, des fauves me ravit. Lorsque j’étais enfant, dans le village breton où je passais mes vacances, des petits cirques venaient l’été s’installer de nuit sur un champ à deux pas de la maison et nous étions réveillés par les coups de masse que deux monteurs assénaient en alternance sur les piquets destinés à monter la tente.

Cirque Colcombet

On attendait avec impatience que les camions-cages s’ouvrent et l’on découvrait parfois des animaux fascinants : une hyène à moitié folle à force de tourner dans sa cage, un hippopotame somnolent dans une cuve douteuse, un ours, un méchant babouin… A force d’en voir, les lamas et les poneys nous agaçaient un peu et nous étions fort déçus quand la ménagerie se réduisait à ces animaux-là. Habilement, un des membres du cirque nous assurait qu’à la représentation, il y aurait des fauves mais que le camion était en panne à 10 km. On ne voyait évidemment jamais ce camion, qui n’était qu’un moyen de nous attirer.

Cirque Colcombet

A Rennes, où la place du Champ-de-Mars offrait beaucoup plus de place, les grands cirques – Amar, Pinder, Jean Richard – déployaient leurs fastes. On apercevait parfois quelques « grands noms » et je me souviens de Jean Richard, Roger Lanzac, Achille Zavatta, Sampion Bouglione, Violette Medrano, Dick Chipperfield… Et quelle émotion en découvrant le fantastique « American Circus » : 3 pistes, plus de 60 chevaux, plus de 20 éléphants immenses…

Cirque Colcombet

J’ai retrouvé cette fascination dans un tout petit livre intitulé « Célébration du cirque » de Jean Monteaux. En voici un extrait que j’aime particulièrement :

« L’entracte offre à l’amateur de Cirque une joie nouvelle. Il s’intègre à la foule mouvante, il entre dans la procession désordonnée qui le conduit à la ménagerie.

Il l’a déjà visitée, le matin ou l’après-midi. Mais y vivrait-il qu’il serait toujours ému par l’odeur dont il distingue tous les composants ; les éléphants fleurent le foin chaud, les chevaux dégagent une buée végétale, les fauves ont un parfum âcre et sensuel qui prend aux reins, les otaries sentent toujours l’eau de lessive, des chimpanzés montent un parfum de fête foraine à cause des cacahuètes qu’ils épluchent, la girafe, isolée dans son enclos, curieusement, est inodore.

Cirque Colcombet

Il distribue le sucre, donne le pain dont il a empli ses poches en partant de chez lui ; et les baves qui se mélangent sur ses mains lui sont un délicieux plaisir. Puis il s’arrête devant le gorille.

Il subit, tête basse, honteux d’être humain, les réflexions et les quolibets que les « curieux » adressent au géant résigné – résigné mais pas indifférent : il souffre de cette atroce incompréhension populaire. L’amateur n’a pas cette résignation ; l’ignoble sottise de la foule lui devient vite insupportable. Alors, il redresse la tête ; son regard rencontre celui du gorille.

Bronze Colcombet gorille des plaines assis

Le gorille Platon – Bronze de D.Colcombet

Il ne s’éloigne pas : il s’enfuit comme s’il avait commis une mauvaise action en sachant qu’il ne pourra jamais la réparer. le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement ; les yeux du gorille en cage non plus.

L’amateur regagne sa place vers la fin de l’entracte. Avant que se rallument les projecteurs, il a toujours quelque incident à observer. le câble retendu, la sciure ratissée, un trapèze libéré, un lustre remonté, l’ouvreuse qui précipite la vente de ses bonbons pour aller enfiler un maillot pailleté de cycliste ou de patineuse, sont autant de détails qu’il croit être le seul à remarquer.

Cirque Colcombet

Quand les musiciens s’asseyent à leur pupitre, il éprouve l’impression confortable du père de famille qui voit ses fils s’attabler pour un dîner de famille.

A la seconde ouverture, sa joie rebondit. Elle est aussi neuve, aussi intacte, aussi enthousiaste qu’à la première. »

KENYA : LA FAUNE DECLINE

J’ai relevé dans Le Monde du 25 avril 2009 un article attristant :

A côté d’une superbe photo de migration de gnous traversant une rivière qui est sans doute la rivère Mara, un petit paragraphe intitulé « La faune sauvage décline au Kénya ».

Bronze Colcombet phacochère Namibie

Phacochère

Il y est expliqué que les populations de gnous, zèbres, gazelles, girafes, antilopes, phacochères – bref de tous les grands ongulés de la savane – diminuaient de façon très importante au Kénya. Selon les résultats d’une étude sur une quinzaine d’années de l’Institut international de recherche sur le bétail financée par le WWF, les pertes dans la réserve de Masaï Mara seraient de l’ordre de 67% pour les impalas (grandes gazelles), 80% pour les phacochères, 95% pour les girafes.

Sculpture bronze Colcombet Namibie

Gnou bleu

Le réchauffement de la planète n’est pas en cause, pour une fois, mais cette chute viendrait de l’augmentation régulière de la population masaï, des pasteurs, sur les terres des réserves.

Impossible de porter un jugement moral sur ces faits : les Masaï, très appauvris, n’ont-ils pas le droit de survivre ? La vie des hommes ne vaut-elle pas plus que celle des animaux ?

Mais c’est juste triste. Je me souviens d’avoir fait des photos dans cette réserve couverte d’herbivores, et notamment d’une scène où l’on voyait un gnou, un éléphant et une girafe regroupés sur un petit espace.

Sculpture bronze Colcombet Namibie

J’ai également eu confirmation, par un autre canal, que la situation des lions sauvages commençait à être précaire en Afrique. Je précise « sauvages » car en captivité les lions se reproduisent si facilement que c’est le cauchemar des directeurs de zoo, qui ne savent plus quoi en faire. Inutile d’imaginer en relâcher en Afrique : ils ne savent pas chasser et cela coûterait trop cher.

Sculpture Colcombet lion Namibie

 

LE MÉNAGERIE DU JARDIN DES PLANTES A PARIS

J’ai redécouvert tout récemment la ménagerie du Jardin des Plantes à Paris et ce fut un émerveillement. C’était au printemps, il faisait beau, le jardin du Muséum était fleuri et tout était paisible.

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Emmanuel Frémiet sculptant, par Henri Greber (1854-1941).

J’ai redécouvert avec grand plaisir les statues de Frémiet : dans le zoo le charmeur de serpent et l’homme préhistorique portant une tête d’ours ; à l’entrée de la galerie de paléontologie (dans le bâtiment lui-même), la terrible scène en pierre de l’orang-outan étranglant un chasseur, puis, juste à l’extérieur, le grand bronze représentant Frémiet sculptant le dénicheur d’ourson, par H.Greber.

Frémiet Muséum Paris

Je me suis souvenu que ce très grand artiste, auteur notamment de l’archange St-Michel en haut du Mont-St-Michel, exerçait de fortes pressions pour obtenir des commandes publiques.

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Je gardais un souvenir très mitigé de la ménagerie : petits enclos, grilles trop visibles, animaux de faible intérêt, à quelques exceptions près. Mais visiblement, depuis quelques années, le zoo a été repris en main. Il est beaucoup plus beau, aéré, la végétation est abondante, et surtout on peut y voir quelques spécimens rares. Il y a moins de grands singes et de fauves mais les bâtiments conservent leur charme désuet. Il n’y a plus d’ours dans la trop petite fosse.

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Parmi les espèces présentées, il faut citer en particulier les Anoas (les plus petits bovins au monde), Markors, Turs, Barals, Mouflons du Caucase (certains petits avaient moins d’une semaine et étaient absolument minuscules), Cervicapres, Pécaris, Paresseux, Cabiais, mais surtout deux animaux très rarement présentés dans les zoos.

Bronze Colcombet Takin

Takin du Sichuan

Le premier est le Takin du Sichuan, bovidé de Chine assez massif, au pelage laineux et littéralement jaune, d’environ 350 kg. Il est affublé de cornes de gnous assez étonnantes. J’en avais vu un au zoo de Montpellier, mais beaucoup moins beau. Il avance doucement, en écartant les pattes comme s’il était perclu de rhumatismes, mais un soigneur m’a dit qu’il n’en était rien.

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Gaur mâle

L’autre animal, absolument incroyable, est le Gaur. C’est le plus grand des Bovidés. Il peut atteindre 2,30 mètres au garrot et peser une tonne. Celui du Jardin des plantes est MONUMENTAL. Il faut imaginer un grand taureau assez svelte auquel on aurait ajouté une énorme couche de muscles sur le dos. Très chassé en Indochine (chasse dangereuse), il est maintenant protégé mais jamais présenté dans les zoos. Un soigneur m’a confirmé son agressivité, surtout en période de rut où même le passage d’un tracteur le rend violent.

Ménagerie Jardin des Plantes Paris Colcombet

Yack

Enfin, citons les énormes tortues des Seychelles, dont la plus vieille pèse plus de 200 KG et a 120 ans !