Après plusieurs mois sans nouvelle création à cause de divers projets dont je vous reparlerai bientôt, j’ai remis les mains dans la terre avec appréhension d’autant plus qu’au lieu de m’attaquer à un animal que j’ai souvent modelé, méthode commode pour se refamiliariser avec la sculpture, je me suis lancé dans la création d’un âne, sujet que je n’ai créé qu’une seule fois il y a longtemps et en petite taille.
La difficulté est qu’à la différence d’un éléphant, d’un rhinocéros ou d’une girafe, il est possible de confondre l’âne avec l’un de ses cousins, le cheval ou le zèbre, qui en est proche. Mais à l’inverse, on dispose d’un peu de liberté car il existe un grand nombre de races d’ânes, des grands ânes du Cotentin aux petits bourricots d’Afrique du Nord en passant par les ânes corses, les ânes sauvages, etc.
La tête de mon âne m’a donné bien des soucis car pendant longtemps, elle a trop ressemblé à celle d’un cheval de trait. Je l’ai donc coupée pour la retravailler tranquillement et le résultat me convient. En modelant, on remarque nécessairement les traits saillants de la morphologie de l’animal. Ici, une tête massive et un cou large, court et peu épais. La crinière droite et les grandes oreilles rapprochent notre âne du zèbre (le zèbre de Grévy a toutefois des oreilles beaucoup plus rondes).
La première domestication de l’âne remonterait au 5ème millénaire avant notre ère, comme en attesterait une déformation du squelette liée au port du bât. Cet animal a ensuite conquis le monde entier, y compris l’Australie où les colons l’ont importé au XVIIème siècle. Aujourd’hui 750 000 ânes vivent en liberté dans le bush de ce continent. D’autres ânes sauvages vivent en Afrique de l’Est (Somalie, Ethiopie, Soudan) et en Asie (on l’appelle alors Hémione ou Kiang selon les régions) ; ils ont généralement une silhouette assez élancée.
Ane du Cotentin à l’Ecomusée de la Bintinais à Rennes (Wikipedia – Eponimm)
En France, sept races sont officiellement reconnues : le baudet du Poitou avec ses longs poils, le grand noir du Berry, l’âne du Cotentin, l’âne normand, l’âne de Provence, l’âne des Pyrénées et l’âne du Bourbonnais. Les haras nationaux possèdent maintenant des étalons de ces races. Il y a bien sûr un grand nombre d’hybrides. La mule (ou mulet), issue de l’accouplement d’un âne et d’une jument, est très appréciée pour sa grande taille, son caractère égal, la sureté de son pied même sur des chemins difficiles, sa sobriété. Cet animal reste très populaire aux Etats-Unis où il est volontiers monté. Le produit d’une ânesse et d’un cheval est le bardot, plus rare.
Hémione – Bronze de A.-L. Barye
Je ne suis évidemment pas le premier sculpteur à représenter un âne, cet animal familier, débordant de qualités et attachant. Parmi les modèles les plus connus ou les plus amusants, outre le petit âne de A.Cain, citons l’âne du Caire, par Fremiet, ou encore le rare hémione de A.-L. Barye et enfin un très bel âne qui braie de Navellier.
Ane qui braie – Bronze de Navellier
Ane du Caire – Bronze par E.Fremiet
On pourrait encore parler des ânes de d’Illiers, Boffil mais curieusement l’âne n’est pas un modèle très courant au XIXème. P.-J. Mêne, qui a modelé un grand nombre de chevaux et d’animaux de la ferme, n’en jamais sculpté.
Mon âne, encore en terre, mesure environ 30 cm de long et 20 cm de haut. Il partira en novembre à la fonderie Barthélémy et sera fondu disponible en bronze début 2023.