Monsieur Joël M. m’a envoyé de très bonnes photos de deux bronzes représentant tous les deux des lévriers : l’un est de Pierre-Jules Mêne et l’autre est de Gayrard. Il est intéressant de les comparer. J’y consacre donc deux notes successives.
Le premier représente un Lévrier couché. Il est parfois appelé « Lévrier afghan ». On connaît ces grands chiens élégants à poils longs qui leur donnent l’air de danser lorsqu’ils marchent ou trottent. Ils sont un peu passés de mode mais il y a encore quelques dizaines d’années, on en voyait beaucoup (avez-vous remarqué que l’on ne voit plus de grands caniches ?). En réalité, même s’il a le poil plus long que les grands lévriers utilisés pour les courses en Angleterre, ce chien ne me semble pas être un Afghan.
Ce bronze est l’oeuvre de Paul Joseph Raymond Gayrard (1807-1855), dont le père Raymond était lui-même sculpteur et précurseur avec Barye de l’art animalier. Éleve de Rude (auteur de « La Marseillaise » de l’Arc-de-Triomphe) et de David d’Angers (« l’ennemi » de Barye), il exposa très jeune, à 20 ans, au Salon à Paris et connut un très grand succès, en particulier pour ses chevaux et ses chiens, mais aussi pour ses personnages : les Évangélistes de l’église Ste-Clothilde à Paris, des bustes de personnages célèbres, une statue équestre de Napoléon III (plus précisément « Le Prince-Président Louis Napoléon »).
Curieusement, sa renommée s’est un peu effacée de nos jours et l’on connaît surtout deux de ses pièces : « le Singe jockey« , qui monte un cheval sautant une haie, et notre chien couché.
On note qu’il est signé : « Gayrard London 1848 », ce qui laisse évidemment supposer qu’il s’est rendu au Royaume-Uni, mais, selon Pierre Kjellberg (« Les Bronzes du XIXème siècle), on n’en a pas la certitude.
C’est un joli sujet, très fin, ce qui se vérifie aux pattes avant, à la ciselure du socle représentant feuilles et branchages. Le dessous du socle révèle une fonte ancienne. Mais, d’une part un animal totalement couché (la tête repose sur le sol) est moins plaisant qu’un sujet moins passif, d’autre part il a souvent été édité. Il ne rencontre donc pas un très grand succès en salle des ventes, comme le montrent les résultats relevés :
– 27 mars 2009 à Drouot : estimé 500 à 700 Euros mais invendu.
– 11 novembre 2009 à Londres : estimé 3000 à 5000 GB£ (beaucoup trop cher !) mais invendu.
– 5 novembre 2003 à Drouot : vendu à 550 Euros.
– 12 février 2002 aux Etats-Unis : estimé 1000 à 1500 US$ mais invendu
– 31 mars 1996 à Soissons : vendu 2600 francs (environ 400 Euros).
On peut donc l’estimer aux environs de 500 Euros, ce qui n’est pas très cher pour un bon sculpteur et une pièce de cette taille (32 cm de long x 15 cm de profondeur x 13 cm de haut). Il existe une réduction en plâtre de ce chien, mesurant environ 20 cm de long. J’ignore si elle a été fondue en bronze.