DES ANIMAUX RÉALISTES ?

En sculptant, une question évidente vient constamment à l’esprit : l’animal est-il réussi ? Pour moi, réussi veut dire réaliste, ce qui est bien entendu lié au style que j’ai retenu. Un artiste qui préfère l’esquisse ou un style moderne et déstructuré verra les choses un peu différemment.

Mais ce terme de réaliste est trompeur.

Sculpture bronze Colcombet éléphant d'Afrique buvant

En effet, je constate que les personnes à qui je montre mes pièces ont très souvent en tête une idée stéréotypée de l’animal et du mal à admettre qu’on en sorte. On me dit parfois que tel animal est trop « ensellé » (dos trop creux), tel autre trop bas sur pattes, un troisième trop maigre…

Sculpture bronze Colcombet Namibie

Pourtant, même pour une espèce donnée, la nature offre une très grande diversité. Ces différences sont connues et généralement admises pour les chevaux : on distingue un cheval de selle d’un cheval de trait, les plus avertis reconnaissent même immédiatement un cheval arabe, par exemple. Mais cette variété est souvent niée pour les autres animaux.

Par exemple, les vaches peuvent être très grandes ou très petites, maigres et anguleuses ou grasses et rondes. Il suffit pour s’en convaincre de feuilleter le très beau livre « Bestiaux » de Yann Artus-Bertrand. On y voit des porcs, des moutons, des ânes étonnamment différents les uns des autres.

Lion blanc zoo Amnéville sculpture Colcombet

Cette diversité existe aussi pour les éléphants, les lions, les girafes, les buffles, au sein même d’un espèce. Un animal voit même sa morphologie et son aspect changer radicalement selon les saisons et son âge : un ours avant ou après l’hibernation n’est pas le même, un morse jeune ou vieux est très différent.

Il m’est souvent arrivé de faire remarquer combien tel animal aperçu au zoo est éloigné du stéréotype de l’espèce. Si je savais le reproduire très exactement, au millimètre près, dans ses dimensions réelles, on me dirait que ma sculpture est complètement ratée.

Sculpture-bronze-Colcombet-gnou

En effet, nous avons – presque – tous en tête un « type-idéal » pour chaque animal. D’où cela vient-il ? Je ne sais pas.

De notre enfance ? Peu probable : dans les livres d’enfant, les animaux sont souvent dessinés, avec plus ou moins de bonheur et les dessins animés exagèrent et humanisent les formes. Des documentaires animaliers, des livres de photos ? Pas très logique, car soit les photos montrent la diversité des animaux (des grands, des petits, des longs, des courts), soit le photographe ou le réalisateur ne montrent que des stéréotypes, ce qui renvoie à la question initiale : pourquoi a-t-il sélectionné ceux-ci ?

Je n’ai donc pas de réponse. Vos avis m’intéressent…

Sculpture bronze Colcombet éléphant d'Afrique patriarche

Une piste peut-être : un sens inné de la beauté, qui nous ferait apprécier instinctivement les belles formes, les proportions équilibrées des animaux. Ce pourrait être (ça l’est sûrement) un sujet du bac de philo : « Avons-nous naturellement le sens de la beauté ? » avec cette particularité que pour les animaux les critères de la beauté seraient partagés par tous…

UNE PASSION POUR LES ANIMAUX (2ème partie)

Lorsque je présente mes sculptures, une question revient souvent : « Travaillez-vous d’après photos ? ».

Colcombet sculpteur démonstration terre argile Cristel

Lorsque je commence un sujet, ce n’est jamais avec une photo sous les yeux et l’idée de reproduire la scène que je vois. J’ai toujours l’animal en tête, en trois dimensions, de façon très précise, comme s’il était déjà fait.

Cette idée qui se forme peu à peu vient souvent des lectures. J’ai ainsi fait mon buffle après avoir lu d’une traite un livre ancien – sans aucune photo ni dessin – sur la vie des buffles en Afrique. Il était si bien écrit, l’auteur exprimait si bien les sentiments que l’on prête malgré soi à cet animal, que l’image est apparue au fil de la lecture.

Sculpture Colcombet buffle d'Afrique

Buffle d’Afrique de l’Ouest – Bronze (D.Colcombet)

J’ai préparé une liste des animaux que je voudrais faire en bronze. Ce sont en général des animaux qui m’intriguent depuis longtemps : le rhinocéros si difficile à dessiner, le chameau mélange de suffisance et de grâce, le taureau charolais que j’aime tant voir dans les champs, etc. J’aimerais faire un lama, un hippopotame, un okapi, une vache, un tapir, un rhinocéros d’Asie… J’aimerais aussi beaucoup faire un centaure mais avec le corps d’un cheval de trait et non de selle comme la mythologie nous en a trop montré. Il faudra bien que je m’essaye aux fauves, mais ma préférence ira au guépard, au puma, à la panthère, au tigre, plutôt qu’au lion.

Je ne me sens pas à l’aise avec les chevaux et les chiens de chasse, sans doute parce que tant de sculpteurs en ont fait et de si beaux. En modelant la terre, il faut que j’ai le sentiment de créer un être original, ce qui est difficile avec un bel étalon arabe ou un pointer car tous les modèles, dans toutes les positions, existent.

Sculpteur Damien Colcombet travaillant le modèle en cire

Je dois reconnaître que je fais appel à des photos, que l’on trouve aisément sur internet, par exemple sur le très riche site Photosearch, pour les détails, en particulier la tête. En effet, il suffit d’une oreille mal placée, d’un œil trop haut, d’une corne trop basse pour qu’il y ait quelque chose qui « cloche », même si on ne sait dire quoi.

UNE PASSION POUR LES ANIMAUX (1ère partie)

Une évidence : pour sculpter, plus précisément modeler (cf. note n° 2), les animaux, il faut les aimer. Mais cela ne suffit pas : il faut savoir observer. Combien de gens ne savent pas observer ! Il ne s’agit pas de passer des heures sans bouger à guetter un battement d’aile, une vague silhouette lointaine ou un trou d’eau, mais simplement d’être attentif.

Sculpture Colcombet sanglier

Sanglier (France)

Je suis frappé par la méconnaissance de beaucoup dans le domaine de la faune : telle personne déplorait qu’il n’y ait pas de rapace en Bretagne, telle autre me demande si les hippopotames sont carnivores… Il y a quelques années, dans un reportage du Figaro sur les safaris en Afrique, la journaliste s’émerveillait de surprendre un tigre (il n’y a pas de tigre en Afrique !). Lorsque je suis parti en safari au Kenya, on m’a demandé de faire des photos de kangourous…

Bien sûr, on ne peut exiger de chacun qu’il soit un spécialiste, d’autant plus qu’il y a des pièges : il existe bien des lions en Asie (quelques-uns, dans la réserve de Gir), des tapirs en Amérique du Sud et en Asie, des élans en Afrique, mais qui n’ont rien à voir avec ceux du Canada, de Russie ou de Scandinavie. Je peux même comprendre qu’on prenne un gnou pour un buffle ou que l’on ne fasse pas la différence entre un éléphant d’Asie et un d’Afrique.

Bronze Colcombet gnou bleu

Gnou bleu

Pourtant, il y a tant et tant d’occasions d’observer les animaux. En forêt, chez nous, par exemple. Mais pour cela, il faut être silencieux et lever la tête. On peut tenter des expériences intéressantes : écouter le brame du cerf, de nuit, en forêt de Rambouillet ou de Compiègne (il y en a d’autres). Emotion garantie si l’on s’approche assez près. Attention, c’est réellement dangereux car le cerf n’hésite pas à charger.

Sculpture bronze Colcombet Namibie

En observation dans le nord de la Namibie

On peut simplement regarder le ciel et observer le ballet des martinets, le vol des milans, les très nombreuses buses perchées sur les piquets de clôture, le long des autoroutes. On peut s’amuser à repérer l’ample vol du héron, qui tout à coup s’agite de façon désordonnée et criarde quand un oiseau vient l’ennuyer. Avez-vous déjà repéré comme les petits oiseaux et les corbeaux assaillent (« houspillent ») les rapaces en vol ?

Il y a aussi les zoos.

En général, ils ont fait de remarquables progrès, présentent des animaux en bonne santé et sont le lieu de jolies promenades. Parmi les plus beaux, je citerais en France Beauval près de Tours, St-Martin-la-Plaine près de Lyon, Touroparc près de Mâcon (plus pour ses animaux que pour le cadre), Doué-la-Fontaine près de Cholet, Branféré près de Vannes (pour le cadre). Il y en a bien d’autres. Je n’ai pas encore eu l’occasion de voir celui de Royan.

Pélican – Zoo de Lyon

A l’étranger, il y a Vienne, superbe, le plus ancien zoo d’Europe, St-Félicien au Québec, Toronto au Canada, immense. Et tant et tant, en Australie ou aux Etats-Unis.

Et puis il y a l’Afrique !

Souvenirs inoubliables au Kenya et, plus tard, en Tanzanie qui venait d’ouvrir ses frontières. J’y suis allé à Pâques, il y a longtemps, et c’était la saison des pluies : aucun touriste, des étendues d’herbes immenses dans le Serengeti, comme une mer infinie, dans laquelle le guide navigue parfaitement. Emotion quand en sortant de ma tente, à l’heure de la sieste, j’ai vu tout près un léopard noir (j’ai finalement décidé de rester un petit moment dans la tente…).

Moments intenses, encore, lorsque embourbés jusqu’à la caisse de la Land Rover, nous avons passé une bonne partie de la nuit entourés de lions. Ou quand, la nuit, sous la tente, on entend alternativement les rugissements des lions et les cris des hyènes.

Sculpture Colcombet lion Namibie

Jeune lion – Parc d’Etosha (Namibie)

Le don d’observation de la nature vient souvent de l’enfance. Notre père, ingénieur agronome, nous emmenait fréquemment dans les fermes qu’il visitait et nous passions des heures à regarder les vaches, les moutons, les cochons et les lapins. C’est ainsi que l’on apprend à distinguer une Holstein d’une Bretonne Pie noire (que l’on ne voit plus guère qu’au salon de l’agriculture), une Salers d’une Limousine. A 8 ans, il m’avait mis sur le dos d’une vache et je me souviens de ma frayeur.

Je ne suis pas chasseur, mais j’ai passé bien des dimanches à suivre des chasses, à attendre sans bouger la passée des canards, à regarder les furets apprivoisés s’engouffrer dans les terriers de lapin, à écouter, immobile, l’infime bruit du chevreuil qui s’approche d’une allée et va la traverser en vitesse.

Renard (France)

J’ai encore passé bien des jours au bord d’un étang familial, à observer les couleuvres et les vipères, les rats musqués, les bécassines, les poissons et les insectes. Je me souviens d’un renard sorti du bois et qui vint tranquillement vers moi avant de s’immobiliser tout près et de faire demi-tour au petit trot.

J’aime tous les animaux. Mais j’ai une préférence pour les grands mammifères, même laids ou méconnus, et pour les vaches. Je ferai un jour une hyène, un tapir, un grand koudou, un oryctérope. Pour les vrais amateurs.

POURQUOI LES BRONZES SONT-ILS SI CHERS ?

Quelle tristesse de penser que Barye fit faillite avec sa fonderie, que Bugatti eut bien du mal à survivre, réclamant à ses proches, en particulier son frère, qu’on lui payât les bronzes qu’ils détenaient, afin qu’il puisse régler sa note de chauffage. Alors qu’aujourd’hui, les « Barye » fondus par Barye valent une fortune et quand un Bugatti est en vente, l’annonce fait toute une page dans la Gazette de Drouot !

Bronze Colcombet Bugatti éléphant

Eléphant d’Asie par Rembrandt Bugatti (1884-1916) – Musée de Rennes

Les trois premières raisons – absolument évidentes – de la cherté d’un bronze sont : le choix du sujet, la qualité de sa réalisation (fonte) et sa rareté.

Le choix du sujet :

Les peintures de bateau d’un peintre de la marine sont presque toujours plus cotées que ses scènes de genre, ses paysages de campagne, ses animaux. De la même façon, on attend généralement d’un sculpteur animalier qu’il fasse… des animaux. Du coup, ses personnages, par exemple, sont souvent moins cotés. Evidemment, il y a mille exceptions à cette règle.

Il y a aussi les « spécialités » : chez Bugatti, tout est maintenant hors de prix puisque ce sont généralement ses œuvres qui battent tous les records de prix, mais ce sont ses fauves les plus inabordables.

Pourtant, si l’on met de côté l’aspect placement financier, il me semble certainement plus intéressant d’avoir une pièce rare, atypique. Un marchand, à Metz, m’a un jour dissuadé d’acheter le « Tigre et gavial » de Barye, me disant que je me lasserai vite de le voir partout (c’est une des œuvres les plus connues de ce sculpteur). Avec quelques années de recul, je vois comme il avait raison, sauf s’il s’agit d’une fonte exceptionnelle.

Bronze Colcombet Barye Tigre gavial

Tigre dévorant un gavial, par AL Barye (1795-1875) – Fonte de l’atelier Barye

Enfin, il y a des sujets porteurs : une scène trop sanguinaire rebutera beaucoup d’acheteurs ; les moutons, les cochons, les chèvres ne plaisent pas à tout le monde, alors qu’un cheval, un chien, une scène orientaliste, un fauve font toujours mouche. Il me semble que les sangliers et cerfs ont un peu lassé les acheteurs. De même, les scènes militaires un peu trop romantiques, du style « La dernière cartouche », « En vedette » (ce qui signifie ; sentinelle faisant le guet), « Le courage militaire » sont passés de mode et ne s’adressent plus guère qu’à un public averti, habitant Saumur ou Coëtquidan ! Ces pièces peuvent pourtant être remarquables.

Bronze Colcombet Anfrie

Officier, par Ch.A,frie (1833-1905)

La qualité de la réalisation :

Il faut ici se référer à mes notes précédentes. La qualité de la réalisation tient d’une part au savoir-faire du sculpteur et finalement à cette question : a-t-il compris l’animal ? A mon sens, Barye en a compris toute la morphologie et Bugatti en a compris toute l’essence. Esquisse, réalisme : il n’est pas possible d’établir de jugement de valeurs entre ces deux approches, qui ont toutes deux donné des merveilles mais ont aussi été prétexte à des œuvres pompières ou absurdes. A force de tout suggérer, on en arrive parfois à ne plus rien exprimer !

La qualité tient d’autre part à la fonte. Ayant déjà écrit sur ce sujet, je ne m’y étendrai pas davantage, si ce n’est pour rappeler que la qualité des Bugatti vient beaucoup des merveilleuses fontes de Hebrard et que les fontes de Valsuani sont généralement remarquables.

La rareté :

Il y a peu de Bugatti donc ils valent une fortune. A titre d’exemple, un petit bouledogue était en vente l’an dernier à Lyon 100 000 Euros, ce qui a été reconnu comme peu cher. Un marchand a tout récemment proposé plus de 300 000 Euros à un collectionneur pour un très beau fauve. Le collectionneur a refusé….

Les Barye fonte Barye sont rarissimes, les Barye fonte XIXème sont assez rares, les Barye fonte XXème et tardives sont courants ; les prix suivent cette logique.

Bronze Barye Colcombet Univers du Bronze catalogue raisonné

Le catalogue raisonné de Barye, de MM. Richarme et Poletti, donne de précieuses indications sur les éditions de chaque modèle.

Le piège pour un collectionneur est se voir proposer comme pièce rare un sujet en fait peu emblématique du sculpteur.

Et le reste… :

Alain Delon a « fait » la cote de Bugatti et fera celle d’autres sculpteurs parce qu’il les collectionnait et qu’il a mis son immense notoriété au service de ce sculpteur, dont l’extraordinaire talent reste incontestable. Pour les sculpteurs contemporains, le coup de main des galeries est déterminant. Un grand sculpteur peut rester longtemps méconnu parce qu’il n’a pas l’occasion ou la volonté de se faire connaître. C’est ainsi que Righetti a été « découvert » récemment et que ses œuvres magnifiques peuvent enfin être admirées.

Bronze Colcombet fonte ciselure

Reprise de la ciselure d’un de mes bronzes – Fonderie Barthélémy Art (Drôme)

J’ai surtout traité ici des bronzes relativement anciens. Concernant les bronzes contemporains, il sont chers parce que sculpter ou modeler prend du temps (mais peindre aussi) et surtout parce que la fonte et la patine sont extrêmement coûteuses : outre la matière première – le cuivre, dont les cours se sont envolés à des hauteurs inimaginables – le travail de la fonderie est compliqué, minutieux, long, demande beaucoup de main-d’œuvre, les fondeurs devant en plus avoir un sens artistique développé. Le sculpteur doit surveiller la fonte, guider le patineur. Il y a peu de fonderie d’art en France et les délais sont maintenant longs (environ 3 mois). Bref, autant de raisons qui font que le collectionneur peut avoir le sentiment que l’artiste se surestime en fixant des prix prohibitifs alors que c’est bien la fonte qui coûte le plus cher. La galerie joue un rôle important, prenant souvent des risques avec des artistes non confirmés et il faut bien qu’elle vive, elle aussi…

ET LES FAUX BRONZES ?

Alors, depuis le décret de 1981 (cf. notes précédentes), il n’y a pas de faux bronze?

Si, bien sûr. Ils peuvent être issus soit de fonderies peu scrupuleuses qui fondent plus de 12 originaux et trichent sur les numéros (il y a ainsi plusieurs 1/8, plusieurs 2/8, etc), ce qui est très rare, soit bien plus souvent de surmoulages (à partir d’un original, on refait un moule qui servira à refondre des bronzes), soit encore de vulgaires imitations d’après un original qui a servi de modèle, sans avoir recours à un moulage, soit encore de fontes à partir de moules originaux anciens, mais ne portent pas la mention « Copie ».

Bronze Colcombet mauvaise fonte

Dessous du socle d’une mauvaise réédition d’un lièvre assis de Gardet, sans mention « Reproduction »

Comment s’y retrouver ? Il faut d’abord faire attention à la finesse des détails. On voit souvent sur des sites de ventes aux enchères internet par exemple, des modèles pompeusement appelés « Barye », « Mène », et qui sont grossiers, lourds, très laids. Le « lion au serpent » de Barye doit avoir été reproduit à un nombre incalculable de fois, dans toutes les matières !

Il faut également bien chercher si le mot « Reproduction » n’a pas été camouflé. Le Louvre édite, tout à fait légalement, de très jolies reproductions en résine (avec la mention « reproduction »).

Bronze Barye reproduction du Louvre Colcombet

Belle réédition par le Louvre en bronze du Hibou de AL Barye, portant la mention légale »Reproduction »

Moule réalisé à partir d’une empreinte de l’œuvre originale réalisée par Barye,

Il faut toujours retourner un bronze pour voir comment il est monté : forme des éventuels écrous, vert-de-gris, etc. On dit que le dessous d’un bronze est sa véritable carte d’identité. Mais là aussi, on trouve des bonnes imitations.

Bronze Barye Colcombet

La marque du fondeur est souvent riche de renseignements. Par exemple, selon les époques, le fondeur Barbedienne signait ses fontes de différentes façons : Barbedienne Paris, Barbedienne fondeur Paris, en majuscules, en minuscules, etc. Au fil des années, Barye lui-même a fait évoluer sa signature. On arrive ainsi à dater un bronze avec précision.

Bronze cachet or Barbedienne Barye Colcombet

Cachet or utilisé par le fondeur Barbedienne sur certains modèles et durant quelques années à la fin du XIXème siècle

Et puis il y a ce qui ne trompe pas – ou pas beaucoup – mais qui prend des années, nécessite de lire beaucoup, de voir énormément de vrais et de faux, mais permet souvent au premier coup d’œil de négliger une pièce et de se jeter sur une autre : l’expérience. Pour en avoir un échantillon, amusez-vous à rechercher « Barye » sur les sites internet de ventes aux enchères de particuliers : vous verrez tout de suite les grotesques imitations et les très rares pièces valables. Le prix est généralement un bon critère.

Pour vous cultivez, taper « Barye », « PJ Mène », « Frémiet », « Fratin », « Rembrandt Bugatti », etc, sur internet. Vous trouverez de très nombreuses photos, en particulier sur les catalogues de ventes aux enchères.

Animals in bronze Payne Colcombet

Il y a aussi quelques publications, parfois exhaustives (catalogue raisonné de Barye, de Frémiet, de Bugatti), hélas trop rares. J’en dresserai bientôt une petite liste sur ce blog.

UN BRONZE ORIGINAL ? UN EXEMPLAIRE MULTIPLE ? UN SURMOULAGE ? UNE COPIE ?

Certains s’étonnent de retrouver, au hasard des galeries et des ventes aux enchères, des bronzes identiques en multiples exemplaires ; d’autres pensent qu’un sculpteur contemporain pourra faire fondre 10, 20, 50 exemplaires de son modèle ; on dit aussi qu’il y a beaucoup de faux bronzes et qu’il est très difficile de reconnaître les vrais…

Bronze Barye Colcombet

La panthère de Tunis, par Antoine-Louis Barye (1795-1875)

En réalité, il faut distinguer la période avant et après le décret du 3 mars 1981, qui a réglementé la production d’éditions originales.

Ce décret prévoit que l’artiste doit choisir le nombre d’épreuves qu’il va produire :

– soit « tirage original » : huit en chiffre arabes (1/8, 2/8,… 8/8) et quatre en chiffres romains (I/IV, II/IV, … IV/IV). Bien que de qualité identique aux huit premières, ces quatre dernières portent le cachet EA, soit « Epreuve d’artiste ». ; en principe, elles ne sont pas destinées à la commercialisation, mais à l’artiste, ses proches, ses amis…

– soit pièce unique gravée « PU ».

– soit multiples au-delà des 12 exemplaires numérotés, par exemple 1/50, 2/50, jusqu’à 50/50.

Le texte prévoit que, outre le numéro de l’épreuve ainsi défini, un bronze doit obligatoirement comporter la signature du sculpteur, le cachet du fondeur et le millésime de l’année de la fonte.

Bronze Barye Colcombet

Taureau cabré, par Antoine-Louis Barye (1795-1875)

Enfin, le décret précise qu’une reproduction est un « surmoulage réalisé lorsque l’œuvre est tombée dans le domaine public, c’est-à-dire 70 ans après la mort de l’artiste. Le mot « reproduction » est alors gravé sur la pièce. »

Tout semble clair. Théoriquement… Car en fait ce texte est très récent (25 ans) et les bronzes antérieurs ne faisaient l’objet d’aucune réglementation de cette sorte. De plus, de nombreux fondeurs, comme Susse et Barbedienne, par exemple, fondaient volontiers les œuvres en plusieurs dizaines voire centaines d’exemplaires. Ce n’est pas pour autant qu’elles étaient de qualité médiocre : d’une part, le savoir-faire de ces grands fondeurs était exceptionnel, d’autre part, si le décret de 1981 a eu pour mérite de réguler le marché du bronze d’art, ce n’est pas parce qu’il prévoit qu’il y a 12 originaux que les pièces suivantes seraient de moindre qualité. Enfin, pour ajouter un peu à la confusion, certains fondeurs du XIXème siècle, comme More par exemple, choisirent volontairement de numéroter leurs pièces.

Mes bronzes sont numérotés 1/8 à 8/8 et I/IV à IV/IV.

Bronze Barye Colcombet

Lion qui marche, par Antoine-Louis Barye (1795-1875)