Fin février, le Burkina est entré brutalement dans la saison sèche et chaude. La semaine précédant notre arrivée, il faisait très doux et même frais selon les pisteurs. Nous n’avons quant à nous connu que la grosse chaleur, très sèche. Le ciel était totalement bleu, sans un nuage, et bien sûr il n’a pas plu puisque les premières pluies arriveront quelques mois plus tard. Une partie des points d’eau était déjà à sec, les autres étaient à un niveau bas. En s’approchant sans bruit de ces derniers, on peut voir beaucoup d’animaux, en particulier un grand nombre d’oiseaux : cigognes épiscopales, assez ternes, magnifiques jabirus (très grandes cigognes noires, rouges et blanches), ombrettes (échassier marron de taille moyenne), calaos de toutes tailles, certains gros comme des dindons, d’autres comme des pies, gangas et francolins (ressemblant un peu à des perdrix), tourterelles de toutes sortes, etc. Les pintades se promènent en bandes, et l’on en tire parfois une ou deux pour les rôtir sur le feu au déjeuner mais seul le blanc est mangeable, les cuisses étant dures et sèches.
Il y a également des rapaces : aigles bateleurs (rois des cabrioles en vol), aigle royaux, aigles pêcheurs (pygargues), milans et bien sûr vautours. Ils sont plus petits que les très grands vautours de l’Afrique de l’Est et assez familiers. Le soir au camp, lorsque les « skiners » dépècent le gibier et préparent les trophées, ils attendent sur un arbre proche ou le toit d’un hangar. Leur cou dénudé leur permet de plonger la tête dans les cadavres sans salir leurs plumes.
Dans les points d’eau, on voit beaucoup de crocodiles, ou plutôt on les aperçoit furtivement car ils entendent et voient très bien. Leurs trous sont très grands et donnent le frisson. Les accidents avec ces sauriens sont relativement fréquents. Ils s’approchent, sous l’eau et sans le moindre remous, des animaux venus boire et jaillissent littéralement hors de l’eau en leur attrapant le museau, puis ils reculent vers l’eau, entraînent leur proie et la noient. Ne pouvant pas mâcher, ils la cachent dans leur terrier sous l’eau et la consommeront quand elle aura suffisamment pourri… Il y a deux ans, l’un des chasseurs avait repéré un grand crocodile sur la terre ferme, à une trentaine de mètres de lui. Les pisteurs ont assuré qu’il était mort et lui ont jeté des pierres et des branches ; il ne bougeait pas. Jusqu’au moment où il a foncé à toute allure sur le chasseur – un crocodile court très vite – qui en est resté cloué sur place. Heureusement, à 3 mètres, le crocodile a fait demi-tour et a plongé dans la mare.
« Terrier » d’un crocodile
Les points d’eau sont des lieux de vie. La plupart des antilopes, en particulier les Cob Defassa et les Hippotragues, ne s’en éloignent pas. On y voit aussi les restes des drames de la brousse : une mâchoire d’éléphanteau enlisé et mort dans la boue, un crâne de gazelle nettoyé par les hyènes et les vautours, des plumes d’oiseau…
Mâchoire inférieure d’un jeune éléphant
Un jour, en pleine chaleur, nous nous sommes approchés sans bruit d’une mare. Nous avons eu la joie de voir un superbe lionne toute proche, s’éloigner orgueilleusement sans un regard pour nous. L’un des chasseurs s’est d’ailleurs jeté imprudemment à sa poursuite dans les fourrés denses, ce qui aurait pu être dangereux si elle avait eu des petits ou s’il s’agissait de la femelle du mâle tué la veille.
Empreinte de lion sur la piste.
J’ai déjà parlé des éléphants, des buffles et des éléphants, ainsi que des grandes antilopes : Bubales, Cob Defassa et magnifiques Hippotragues Rouans, athlétiques et altiers. On voit également beaucoup de Phacochères. Revivant la fable du Héron, l’un des chasseurs en a vu un superbe le premier jour de chasse, une cible parfaite, se mettant de face, de profil, de dos, comme attendant le coup de fusil, mais le chasseur ne voulait pas tirer dès le premier jour et s’est dit qu’il en trouverait bien un autre dans la semaine. Ce qui bien entendu n’est pas arrivé et il est rentré bredouille de son voyage.
Cette fois, à cause de son inconscience, ce phacochère aura la vie sauve…
Enfin, il y a de très belles petites antilopes : Ourébis, Céphalophes (plusieurs espèces) et surtout Guibs Harnachés, dont les mâles ont une superbe robe rayée et tachetée. Ils sont très craintifs et fuient rapidement.
Peu de serpents, quelques lézards et geckos, peu d’insectes hormis les assommantes mouches minuscules.