Monsieur Alex A. m’a envoyé quelques photos d’un très joli bronze de Pierre-Jules Mêne. Il a trouvé un bref descriptif sur internet, mais comme il s’agit visiblement d’un texte en anglais traduit de façon automatique, je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager ce moment de poésie surréaliste (j’espère que notre internaute, qui n’y est pour rien, ne m’en voudra pas) :

« DESCRIPTION: Une sculpture réaliste d’excellente caractéristique montrant la relation entre une jument et son poulain hargneuse ludique. Le bronze a une excellente frottée légèrement patinée et des détails de surface croustillante. Élevée sur la base naturaliste ovale. »

Vous apprécierez la « surface croustillante » !

Bronze ancien Mêne Colcombet

J’ai déjà parlé de Pierre-Jules Mêne (avec un accent circonflexe et non pas grave, comme on le voit souvent) mais comme je viens de relire sa vie dans le superbe « Catalogue raisonné » de MM. Richarme et Poletti (Univers Du Bronze), voici encore quelques mots sur ce très grand sculpteur exclusivement animalier.

Bronze ancien Mêne Colcombet

Né en 1810 et mort en 1879, il s’est spécialisé dans les scènes de chasse, les chevaux et les chiens. Il a aussi réalisé des animaux de ferme, de basse-cour (dont un très joli coq), quelques animaux sauvages, mais il est particulièrement connu pour ses chiens et chevaux. Il dessinait fort bien et s’attachait à reproduire exactement la morphologie de races bien précises. On pourrait tout juste lui reprocher d’avoir un peu raté un chamois au museau étonnamment long (chamois sautant n°2)… Il est connu pour réaliser des pièces incroyablement détaillées et finement ciselées. Il a très vite connu le succès. Détail touchant, il est décédé très peu de temps après son épouse, qu’il adorait et qui le secondait fort bien. Sa fille s’était mariée avec le sculpteur animalier Auguste Cain et tout ce petit monde vivait bourgeoisement dans le bonheur familial d’une même grande maison.

Bronze ancien Mêne Colcombet

Mène ouvrit sa propre fonderie en 1837 pour éditer ses œuvres puis celles de son gendre. Comme tous les sculpteurs renommés, Mêne fut imité et il existe un très grand nombre de copies plus ou moins bien réalisées de ses œuvres.

Bronze ancien Mêne Colcombet
Le bronze ici présenté s’appelle précisément « Jument arabe et son poulain (Kemlem-Handani)« . Il a été créé en 1850 et édité aussitôt. Il en existe une réduction de 26 cm de long soit environ la moitié de celui-ci. Présenté au Salon en 1850, avec d’autres pièces, il est remarqué par le prince Louis-Napoléon, qui en fait l’acquisition. Dans le catalogue du fondeur Susse, fin XIXème, il est vendu 300 Euros. Les dimensions mentionnées sont celles-ci : h. 30 cm, l. 50 cm, p. 24 cm.
Bronze ancien Mêne Colcombet
Selon MM. Richarme et Poletti, cette scène a connu un succès limité – peut-être à cause de sa grande taille ? – et les tirages sont généralement d’époque et de bonne qualité (à la différence de la réduction, largement copiée).
Le bronze qui nous est ici soumis est très fin : voyez les veines sur la tête de la jument, les petits sabots du poulain.
Malgré tout, la ciselure n’est pas aussi parfaite qu’on pourrait le souhaiter : le corps de l’animal adulte est un peu trop lisse et les détails du sol ne sont pas aussi précis que sur les plus beaux exemplaires.
Bronze ancien Mêne Colcombet
Cela reste un magnifique bronze et, bien qu’on ne puisse en être certain qu’en le voyant en réalité, il est peu probable que ce soit une copie ou une fonte tardive.
Il est difficile de donner un prix à un tel sujet car les bronzes de Mêne de cette taille sont maintenant rares. Je relève que la réduction sera mise en vente à Evreux dans quelques jours, à un prix qui devrait tourner autour de 2500 Euros je crois.
Si un examen attentif confirme bien que le grand bronze de notre internaute est ancien, il pourrait sans doute se situer autour de 6000 Euros.